Au Cameroun

Publié le par Balmoral


06 Feb 2009
Emmanuel Essimi Menye : Le grand argentier veut briser la glace

Après avoir accompagné le chef de l’Etat à Libreville, il est resté dans l’actualité à travers les réformes économiques et financières.

Le nom et les fonctions sont restés les mêmes, mais les temps ont manifestement changé. Et la différence est désormais claire entre Essimi Menye, " bleu " dans le gouvernement en temps que ministre plein, qui présentait, en novembre 2007 devant les députés le projet de budget 2008 (moins de 2 mois après sa nomination comme ministre des Finances), et Essimi Menye, 14 mois plus tard, qui rentre d'une opération commando à Libreville au Gabon (où il accompagnait, entre autres membres du gouvernement, le chef de l'Etat au sommet extraordinaire de la Cémac, convoque pour régler quelques problèmes urgents à la Beac), et qui convoque les journalistes de la presse nationale et internationale pour inaugurer une " nouvelle ère de communication au sein du ministère des Finances " qui devra devenir (redevenir ?) comme une maison de verre, où on n'a rien à cacher.

Essimi Menye a manifestement gagné en assurance. Même Son comportement vestimentaire raffiné est aussi rassurant… Après avoir probablement été " rassuré et félicité par la très haute hiérarchie " au terme de la réalisation d'un exercice budgétaire 2008 que le président de la République aurait en personne qualifié de remarquable. Ceci justifie-t-il la montée en régime du ministre des Finances qui a annoncé, mercredi dernier devant le représentant résident du Fonds monétaire international, que le Cameroun allait désormais s'approprier son programme économique, pour le travailler avec les partenaires au développement que dans le cadre des relations statutaires avec le Fmi ? Le propos a tonné cette semaine comme une rupture qui n'avait pas l'air improvisée. Le Minfi ayant tenu à confirmer que des équipes de son département ministériel et de celui en charge de l'Economie sont en train de finaliser les documents y relatifs.

Le temps a passé et les choses semblent avoir changé pour cet homme né il y a 58 ans à Mfomakap dans le département de la Lékié (région du Centre). Ses proches disent qu'il a gardé des caractéristiques de fonceur et de baroudeur, propres aux originaires de ce département, même s'il a gagné en finesse. On le sent plus sûr de lui, moins crispé et même, parfois, plus souriant que d'ordinaire… Presque étonnant pour cet homme au physique d'athlète réputé austère qui, avant son entrée au gouvernement comme ministre délégué auprès du ministre de l'Economie et des Finances en septembre 2006, était peu connu du grand public. Il occupait alors les fonctions de conseiller de l'administrateur du Cameroun au Fonds monétaire international (Fmi) à Washington.

Mission
Ceux qui sont proches des cercles de décisions savaient pourtant que pendant les trois dernières années avant son entrée au gouvernement, il avait aidé à améliorer le dialogue entre le Cameroun et le Fmi. Mais combien de Camerounais savaient-ils que Essimi Menye était parti de sa Lékié natale pour l'Institut des statistiques et d'économie appliquée au Maroc ? Qu'il s'était rendu ensuite en France où il a obtenu un Dea en traitement de données, un Dea en économie de la production à Paris Dauphine, un Dea en économie à l'Institut des sciences et techniques nucléaires de Saclay. Et que, de retour au Cameroun en 1989, il a occupé diverses fonctions à la direction de la Statistique. Il a ainsi réalisé le recensement des industries du Cameroun avant de se voir confier la collecte des l'informations auprès des entreprises industrielles du pays.

Essimi Menye a pris du galon. Il essaie de se construire chaque jour qui passe un bilan. Pas aux yeux de l'opinion publique et des agents de la Fonction publique ceux-là désespèrent de voir les effets d'une embellie économique ; ils auront subi toute l'année les effets de la vie chère dont les ordonnances du chef de l'Etat, prises au lendemain des émeutes de la faim de février 2008, n'ont pas contribué à inverser la tendance. Il ne semble pas s'en soucier outre mesure. Essimi Menye confie volontiers qu'il ne cherche pas à être populaire, mais à remplir une mission, celle à lui assignée par le chef de l'Etat.

Après 17 mois à gérer un porte feuille plein, il sait aussi que, même s'il est plus à l'aise dans des missions comme celle où il a accompagné le chef de l'Etat à Libreville, ou lorsqu'il co-présidait la réunion ministérielle de la Cémac ayant préparé ce sommet extraordinaire, son rôle est aussi d'aller au " charbon " pour le régime, comme lorsqu'il a fallu par exemple préparer l'opinion à des décisions politiques compliquées. Parce que, même s'il n'affiche pas de manière ostentatoire sa tenue du parti Rdpc, il est désormais une " personnalité ressource " de premier plan, qui, en son temps, a fait partie des tout premiers signataires de " l'appel de la Lékié ", demandant au chef de l'Etat de modifier la constitution pour faire sauter le verrou de la limitation des mandats…

Mais il a beau être à l'aise, le ministre des Finances n'arrive toujours pas à se faire à l'idée qu'il n'utilisera plus son prénom, au moins tant qu'il sera dans le gouvernement. Lui à qui ses parents ont attribué le prénom, très biblique de Emmanuel, a eu le malheur d'être nommé par un décret du président de la République où il se prénommait Lazare, confusion probablement faite avec un autre Essimi, longtemps arbitre de football, mais dont le deuxième nom était Mbengue. A défaut d'encaisser sans broncher ce prénom qui n'est pas le sien, il s'habitue péniblement à fonctionner avec ses deux noms et sans prénom. C'est vrai, cela n'empêche pas de prendre de grandes décisions sur l'avenir économique du Cameroun. Après tout, on ne peut pas tout avoir…

Alain B. Batongué

Publié dans revue de presse

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article