PC chinois=SS

Publié le par Balmoral

On ne peut à la fois dénoncer un complot de l’étranger et laisser s’enclencher l’engrenage de la violence. Un quotidien de Hong Kong met en cause la gestion des émeutes par les autorités chinoises.


Des policiers dans les rues d'Urumqi, 7 juillet 2009

Des policiers dans les rues d'Urumqi, 7 juillet 2009

Les émeutes qui ont éclaté à Urumqi, le 5 juillet, ont fait au moins 156 morts et plus de 800 blessés. Un bilan beaucoup plus lourd que celui des émeutes survenues à Lhassa au printemps 2008, qui avaient fait [officiellement] 18 morts et plus de 380 blessés. Ce triste bilan fait date dans les émeutes qui ont eu lieu cette année en Chine. Certains internautes en imputent simplement la responsabilité à la cruauté des Ouïgours et n’hésitent pas à pousser des clameurs de guerre. "Combattons la violence par la violence !" peut-on lire. Mais, manifestement, ce n’est là que le résultat de la propagande unilatérale développée par le gouvernement. Quand les autorités entreprennent de résoudre un tel problème, ne suffirait-il pas qu’elles acceptent de prendre leurs responsabilités, qu’elles communiquent avec les manifestants le plus tôt possible et qu’elles alertent au plus vite la population pour limiter le nombre de victimes ?

Toute manifestation de violence qui frappe des civils innocents doit être condamnée et combattue, mais ce n’est pas pour autant que le gouvernement peut avoir recours à ce prétexte pour se soustraire à la responsabilité qui est la sienne : protéger les civils. Le gouvernement se doit de résoudre de façon équitable et impartiale les conflits ethniques afin d’éviter l’accentuation des tensions. Il se doit aussi de donner l’alerte afin que des civils innocents ne se trouvent pas impliqués et blessés dans ces affrontements. Lorsqu’un conflit opposant des Chinois Hans à des Ouïgours dans une usine du Guangdong [le 26 juin, faisant deux morts parmi les Ouïgours] dégénère en émeute de grande ampleur au Xinjiang [le 5 juillet], faisant de nombreuses victimes, quelles que soient les explications invoquées par les autorités, il leur sera bien difficile par la suite de nier leurs torts.

Les manifestations ont débuté à Urumqi le 5 juillet vers 17 heures et ont donné lieu à de nombreux affrontements entre la police et les civils, mais ce n’est qu’à 21 heures qu'a été publiée une dépêche de l’agence officielle Xinhua, autant dire bien trop tard pour permettre de prévenir la population locale du danger. Pourtant, assez tôt dans la journée, un forum sur Internet avait fait état de l’agitation, mais tous les commentaires relatifs à ce sujet avaient été aussitôt effacés. Les autorités ont établi que les émeutes d’Urumqi avaient été préméditées, les pillages organisés, et elles soutiennent qu’elles ont la preuve que celles-ci ont été orchestrées avec la dissidence ouïgoure en exil, par le biais d’Internet et du téléphone portable. Mais, alors, si elles disposaient de ces informations, pourquoi n’ont-elles pas pris les mesures appropriées et averti la population ? Pourquoi n’ont-elles pas donné l’alerte ? Fallait-il laisser les civils se faire massacrer pour mieux condamner ensuite les responsables ?

Depuis les émeutes survenues à Lhassa jusqu’à celles d’Urumqi, on observe que le mode opératoire des autorités chinoises est toujours sensiblement le même et peut se résumer à trois phases : tout d’abord, empêcher la fuite des informations et ne pas prévenir la population locale du danger ; ensuite, quand le conflit s’envenime, recourir à une forte répression ; enfin, la répression terminée, accuser la dissidence en exil d’être l’instigatrice du conflit. A chacune de ces trois phases, il apparaît clairement que le gouvernement n’a aucune intention d’engager un dialogue avec ces populations tibétaines ou ouïgoures sur le point de se rebeller. Il n’a pas non plus l’intention de saisir la moindre chance d’apaiser les tensions, ni d'assurer la protection des civils. Au contraire, il semble vouloir contribuer à alourdir le bilan des émeutes afin d’en blâmer davantage l’ennemi qui est dans sa ligne de mire : la dissidence en exil.

Exacerbée par les images diffusées par les autorités montrant les civils blessés dans les affrontements, la haine des Chinois Hans à l’égard des Tibétains et des Ouïgours s’accroît. Le mécontentement grandit également face aux traitements de faveur accordés aux minorités ethniques. Se pourrait-il que ce soit en définitive l'objectif des autorités chinoises avec leur opération de propagande ? Si c'est le cas, comment cela pourrait-il aider à réconcilier les peuples et à construire cette fameuse "société harmonieuse" voulue par le président Hu Jintao ?

Publié dans revue de presse

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